Avec lui la conversation sest immédiatement engagée sur des territoires plus intellectuels que visuels, et sest articulée dans une sorte de monologue apparemment déconstruit qui sest finalement avéré parfaitement structuré. Sa pensée est à limage de son travail : « Je sature les espaces pour arriver à une sorte dautodestruction, de tension extrême. Mon travail sorganise autour dun trou, il repose sur labsence et le manque pour arriver à une implosion. Cest comme créer un vide qui engendre quelque chose à partir dun autre vide. » franckDavid donne une forme à son mode de pensée, à ses images mentales, aux circulations incessantes quil effectue avec le chaos structuré de sa pensée, avec le langage et lobjet. En 2001, pour son exposition « Le ciel est la limite oui mais mes cheveux repoussent » à la galerie Chez Valentin, il avait créé des meubles de rangement imposants et apparemment inutiles, une énorme bulle en plastique à lentrée de la galerie, bouchant laccès à lespace, et parmi dautres choses encore, des étagères métalliques avec, posés dessus, des objets emballés. Ces objets étaient recouverts de plastique de telle sorte quon pouvait deviner parfois une forme et parfois non, laissant chacun imaginer ce quil voulait. Notre imagination était aussi stimulée par les marques commerciales que lartiste avait laissées et redessinées sur les plastiques demballage, jetant ainsi plus de trouble encore. franckDavid brouille les pistes, multiplie les lectures, les interprétations possibles, crée son propre vocabulaire à partir de langages existants. Avec Comme des fourmis au bout des doigts, il plante des centaines daiguilles sur les points dun texte en braille.
Lenchevêtrement de tiges empêche alors la lecture de laveugle comme celle du voyant, tous deux incapables de déchiffrer les signes. Lartiste crée encore son propre vocabulaire en infiltrant les codes structurels et linguistiques dun supermarché : Bonjour madame la marchande est un orgue de barbarie fonctionnant à partir de cartons musicaux dun autre genre. franckDavid a découpé tout ce qui avait été écrit sur des étiquettes de boîtes de conserve. Les papiers ainsi découpés et collés les uns aux autres produisaient, une fois dans la machine, une « musique de supermarché » décalée. Créer un objet, une vision, un sens, à partir dune autre forme, modifier la réalité pour offrir un autre angle de vision, mixer, effacer, emboîter, voilà ce qui caractériserait luvre de franckDavid, protéiforme, extensible. « Mon travail est une mise à nu de ma structure mentale qui se formule sans arrêt et en temps réel. Cest pour cette raison là que je ninscris jamais de dates, je ne veux pas fixer mon travail dans lhistoire de lart, ni dans ma propre histoire. Il faut appréhender mon travail de façon globale, à léchelle dune vie. »